Les vœux religieux : captivité ou liberté ?
L’obéissance ? Aliénation arriérée ! La chasteté ? Fardeau immoral ! La pauvreté ? Dépendance humiliante ! En faire l’objet de vœux ? Contrainte absurde !
Et pourtant… Depuis deux mille ans, des hommes et des femmes sans nombre ont embrassé la vie consacrée et professé les vœux religieux. À la suite du Christ, encore aujourd’hui, ils connaissent la joie d’avoir tout donné pour son Royaume. Or la joie est-elle signe de servitude ? N’est-elle pas plutôt signe d’une parfaite liberté ? Mieux encore, l’Église, reconnaissant dans les vœux un moyen privilégié d’union à Dieu et de sainteté, approuve et consacre cet état de vie. Or une mère laisse-t-elle captifs ses enfants ? De toute évidence, non. Alors, sont-ils donc vraiment enchaînés ceux que le Seigneur appelle à le suivre de façon radicale ?
Notre siècle si avide de liberté se méprend gravement sur sa nature même. Est-elle la satisfaction indifférente de tous nos besoins, de tous nos désirs, de toutes nos passions ? Comprise ainsi, elle n’est que servitude et désordre ; l’homme pécheur ne le sait que trop. Au contraire, Dieu nous a donné une liberté pour nous construire. Elle est ce pouvoir – limité, car nous sommes des créatures – de se déterminer soi-même vers le bien. Pas n’importe lequel, mais celui que notre intelligence reconnaît bon pour nous, personnellement.
Le suivre, L’imiter, ne rien Lui préférer : voilà le bien que le Christ propose à certains en les appelant par amour. Après l’indispensable période de probation – de longues années très vite passées –, les vœux forment la réponse de ces « appelés ». Avec le secours de la grâce divine, ces derniers se fixent dans le bien qui permettra, au long des jours, leur plein épanouissement humain et spirituel. La profession des conseils évangéliques – obéissance, pauvreté et chasteté – garantissent ainsi la liberté entière de leur ascension vers Dieu. En obéissant, ils sont libres, car ils adhèrent de manière décidée à la volonté de Dieu ; en vivant pauvres, ils se détachent des richesses passagères du monde ; en demeurant chastes, ils acquièrent une plus totale liberté pour s’unir à Dieu. Quant aux religieux cloîtrés, ils entendent souvent cette question : « Vous ne pouvez plus sortir ? » Ils le peuvent puisqu’ils ont la clé, mais ils ne le veulent pas ! La liberté ne consiste pas à échapper à Dieu, mais à ne s’en séparer jamais, dit le troisième abbé de Solesmes, Dom Paul Delatte.
Ainsi, la vie consacrée n’est composée que de bénévoles, au sens noble du terme, ceux qui veulent bien répondre à cet appel plein de tendresse : Si tu veux être parfait… suis-moi ! (Mt 19, 21). Il y a là un grand mystère dont le seul motif est l’Amour divin révélé par le Christ.